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Le top 14 des hashtags de la crise centrafricaine

Depuis qu’actualité rime avec Internet, sur les réseaux sociaux des mots ayant un rapport bien particulier avec mon pays et ses récents soubresauts politico-militaires, ont fait leur apparition sur la Toile. Petit rappel des 14 mots-clés qui font la crise centrafricaine.

hashtag
L’utilisation des hashtags dans les pays francophones

Même si la communauté virtuelle centrafricaine est loin de figurer en bonne place sur la liste des pays qui utilisent le plus de hashtags, voici ma sélection…

1 #Seleka

Coalition constituée en août 2012 de partis politiques et de forces rebelles centrafricaines opposés au régime du président François Bozizé. Elle s’empare du pouvoir de Bangui le 24 mars 2013 sans rencontrer de forte résistance. Cette coalition met en place un régime de terreur et propulse Michel Djotodia à la tête d’une République centrafricaine en proie aux exactions menées par ce groupe armé appuyé par des mercenaires tchadiens et soudanais. Dès la prise de pouvoir de la Seleka, s’en suivent pillages, destructions de dossiers administratifs et profanations de lieux de culte chrétiens.  A tort ou à raison, on assimile la Seleka à un groupe de djihadistes venu islamiser la Centrafrique.  Mais qui se cache derrière l’appellation générique Séléka ? Elle est composée de la Convention des patriotes pour la justice et la paix du général Noureddine Adam (chef des services de sécurité de Michel Djotodia) et Éric Néris-Massi (porte-parole et coordonnateur international de la Seleka), de l’Union des forces démocratiques pour le rassemblement du déficient Michel Djotodia (elle forme la quasi-totalité de la coalition). Dans le back de ceux qui ont quitté le navire sanguinaire sélékan, figure le Front démocratique du peuple centrafricain de Martin Koumtamadji (alias Abdoulaye Miskine) et deux autres organisations moins connues: la Convention patriotique du salut du kodro de Mohamed-Moussa Dhaffane – lequel se met à dos le régime de Djotodia en dénonçant les exactions des éléments de la Séléka sur la population et sera enfermé à la maison d’arrêt du Camp Deroux avant d’être libéré quelques jours avant la démission de Djotodia, le 10 janvier 2014 – ainsi que l’Alliance pour la renaissance et la refondation qui regroupe des officiers hostiles au régime.

2 #Djotodia

Michel Djotodia est désormais en exil au Bénin (REUTERS/Alain Amontchi)
Michel Djotodia est désormais en exil au Bénin (REUTERS/Alain Amontchi)

Leader très contesté de la coalition rebelle Seleka, soutenu face à Bozizé par les leaders de l’opposition dite démocratique, il s’autoproclame président de la République centrafricaine aux lendemains de la fuite de Bozizé au Cameroun. Les idéaux de ce diplomate centrafricain formé en Union soviétique, quoique contraires aux valeurs morales des fondateurs de la RCA, comme la partition du pays en zone chrétienne et musulmane apparaissent clairement dans une missive ayant fait le tour du web et dans la déclaration d’Abakar Sabone, alors porte-parole de la présidence lors de l’excursion des groupes d’auto-défense anti-balaka, et menaçant le pouvoir de Bangui. Djotodia aura été pour bon nombre de Centrafricains, l’incarnation de la descente aux enfer de la RCA. Improbable jusqu’au bout, son célèbre discours :  » La RCA, c’est 623 000 km², nous ne pouvons pas tout contrôler », ainsi que la scène dans laquelle il remet en direct à la télévision nationale centrafricaine une somme de 70 000 francs Cfa à une chef de quartier pour libérer des jeunes habitants pris en otage par des éléments de la Séléka, démontrent le manque d’autorité de celui dont de nombreux proches seraient impliqués dans des affaires d’escroquerie en bande organisée, de vols à mains armées et d’assassinats. Aujourd’hui en exil doré au Bénin, Michel Djotodia comme ces nombreux acteurs du chaos centrafricain ne sont inquiétés des actes crapuleux commis sur la population civile et les biens de l’État.

3 #Bozizé

François Bozizé (Africanarguments.org)
François Bozizé (Africanarguments.org)

Chef d’État de la République centrafricaine après avoir renversé Ange Félix Patassé en mars 2003, François Bozizé Yangouvounda, général d’armée de son Etat, n’a pas pu résister au virus Séléka et a quitté son fauteuil présidentiel le 24 mars 2013. Indexé par l’armée pour ne pas avoir mis à sa disposition les moyens nécessaires pour la lutte contre l’invasion Séléka, débutée en août 2012, François Bozizé après sa fuite de Bangui a fait le tour de l’Afrique s’érigeant petit à petit en manipulateur. Il accorde désespérément à sa cause le malheur du peuple centrafricain en proie à la violence des mercenaires tchadiens et soudanais. Il fonde avec l’un de ses proches et porte-parole, Lévy Yakité, le Front pour le retour à l’Ordre Constitutionnel en Centrafrique qu’il détourne à des fins politiques à ses profits. La résistance menée par les populations du nord-ouest ont par ailleurs abouti à la création des groupes d’auto-défense anti-balaka. Héritier de la mal gouvernance de ses précurseurs, Bozizé ne s’est pas démarqué en propulsant le Centrafrique au niveau méritant. Bien que le moindre mal d’une Centrafrique longtemps absente du concert des nations, Bozizé n’a pas fait mieux que Patassé qu’il a renversé et a plongé dans une gestion clanique qui a précédé sa chute. Comme un secret de Polichinelle, les écarts de comportements d’une bonne partie de la Bozizie a plus qu’exaspéré un grand nombre de Centrafricains aux droits bafoués.

4 #24mars2013

C’est la date de la descente aux enfers de la République centrafricaine incarnée par la chute de Bangui. Ce dimanche n’a pas été comme les autres. Ce qui ne devait être qu’une prise de pouvoir où il n’y a eu aucune résistance, s’est transformée par la suite en enfer pour les populations de Bangui et l’ensemble du pays. Trois quarts des domiciles privés et entreprises ont été mis à vide et les biens envolés vers le Tchad et le Soudan ou revendus sur place. Témoin de d’une scène de pillage, j’ai assisté le 24 mars, aux environs de 11h, à la prise de plus d’une cinquantaine de véhicules au siège de la CFAO à Bangui. Des biens pillés aux assassinats qui s’en sont suivis, cette date rappelle de douloureux souvenirs aux Centrafricains.

5 #Tchadiens

Pointé du doigt par de nombreux Centrafricains pour s’être mêlé à la crise centrafricaine, le Tchadien est malheureusement vu comme l’ami qui a trahi. Idriss Deby Itno, le Président tchadien lui-même très impliqué dans cette crise et dont on dit de lui qu’il est le parrain politique de Djotodia, n’est autre que celui qui a précipité la chute de Bozizé et a imposé ses hommes de main au sein de l’exécutif centrafricain. Nourel Adam, un proche de Deby dont la population de Boy-Rabe (un quartier hostile au régime Séléka) garde de mauvais souvenirs, est la preuve de l’implication de l’homme fort du palais rose. La population tchadienne de Centrafrique est prise à partie et accusée d’avoir soutenu la Séléka. Ainsi tout ce qui est musulman fait sujet d’amalgame et devient « dangereux » aux yeux la population centrafricaine dont le bourreau était la Séléka. Au fil des événements, les autorités tchadiennes prennent conscience de l’ampleur de la situation et organisent des rapatriements en masse. Les ressortissants tchadiens ont été les premiers de tous les autres ressortissants de l’Afrique noire à quitter le territoire centrafricain après les événements du 5 décembre 2013.

6 #Misca

La Mission Internationale de soutien à la Centrafrique sous conduite Africaine aura été au cœur de toutes les controverses. D’abord, une majorité de la population chrétienne a taxé le contingent tchadien d’être à l’origine de l’entrée de la Séléka à Bangui. Pour la petite histoire, un bon nombre d’éléments de la  Séléka s’est infiltré en se déguisant en force de la MISCA, portant les brassards accordés à cette force multinationale d’Afrique. Ensuite, vient la fin du règne Séléka où, d’un côté les populations musulmanes fuyant les exactions des anti-balaka, accusent les forces burundaises de laisser faire.

7#Sangaris

Une autre mission française en territoire africain qui assiste au déchirement de la population. Si ce n’est protéger l’aéroport de Bangui M’poko, qui si on en croit les objectifs de la France en Centrafrique est un intérêt français, cette force dépêchée par le président français François Hollande avant même l’accord de ses paires d’Europe, n’est autre que le pyromane de l’histoire. Rappelons-nous de l’appel lancé par Bozizé début mars 2013 à la France pour venir en aide à la population centrafricaine… On connaît la suite. Quand le chaos occasionné par l’Élysée a atteint son sommet, la France a mis en place la force Sangaris qui joue les spectateurs. L’ennemi qui sauve ou l’ami qui enfonce le poignard, la Sangaris dit-on entretien de bonnes relations avec les milices d’auto-défense anti-balaka.

8 #Anti-balaka

Milice d’auto-défense issue de la population, les « anti balle AK » ont vu le jour pour contrer la montée de la violence de la Séléka sur les populations civiles. Parti du nord-ouest de la République centrafricaine, ce groupe constitué au début de jeunes guerriers volontaires des villages du nord-ouest sera très vite détourné de ses véritables objectifs: protéger la population. Portés par le courage de ses combattants, les anti-balaka arrivent aux portes de Bangui et sont imités sur tout le territoire où naissent des groupes d’auto-défense similaires. Comme dans la Séléka, la barbarie gagne les rangs de groupe, ainsi des exactions sont commises et cette fois en majorité sur la population musulmane. Pire que la Séléka, ils tuent, pillent, violent, détruisent tous sur leur passage, depuis le 5 décembre 2013.

9 #5décembre2013

Si le 24 mars la RCA s’est retrouvée en enfer, le pire est arrivé le 5 décembre. C’est comme si on avait tué un mort qui se trouvait déjà en enfer. La tentative de coup d’Etat des anti-balaka du 5 décembre ayant précipitée le départ de Djotodia n’a fait qu’enfoncer le pays dans l’enfer le plus sombre. L’économie tenue à majorité par les populations musulmanes obligées de fuir le pays en raison des exactions à leur encontre, est plus que fragilisé.

10 #LedgerPlazza

C’est le nom donné au camp de fortune des déplacés face aux violences occasionnées par les Seléka. C’est en vérité le nom du plus grand hôtel en Centrafrique, le Ledger Plazza situé sur l’avenue de l’indépendance et qui a donné son nom à ces camps de déplacés qu’on retrouve un peu partout dans les quartiers ayant faits les frais des caprices sanguinaires de la Seleka. Le plus grand Ledger Plazza est celui des abords de l’aéroport Bangui M’poko où plus de 100 000 personnes entassées vivent dans des conditions effroyables.

L'aéroport de Bangui transformé en camp de réfugiés (Crédits: France24)
L’aéroport de Bangui transformé en camp de réfugiés (Crédits: France24)

11 #Faca

Les Forces Armées Centrafricaines, inexistantes depuis la début de la crise, dissoutes puis reconduites et restées à l’écart pendant toute la période Seleka. Cette armée fait son apparition dans le glossaire de la crise centrafricaine pour son incapacité à défendre le peuple. Récemment, elle a fait parler d’elle quand quelques-uns de ses membres ont battu à mort un des leurs ayant travaillé avec le régime Seleka. Scène indigne d’une armée républicaine surtout que les auteurs de l’acte ont exhibé des photos sur les réseaux sociaux avec des membres amputés du pseudo traître.

12 #SambaPanza

Catherine Samba-Panza, la nouvelle présidente centrafricaine de transition, ici le 21 janvier à Bangui (REUTERS/Siegfried Modola)
Catherine Samba-Panza, la nouvelle présidente centrafricaine de transition, ici le 21 janvier à Bangui (REUTERS/Siegfried Modola)

Première femme présidente d’une Centrafrique riche mais invisible, elle hérite d’un fauteuil présidentiel entaché de sang par ses précurseurs. Espoir d’une sortie de crise, le peuple centrafricain voit en elle la rupture avec le passé douloureux.

13 #Religion

C’est à la religion que les politiques centrafricains ont fait porter le chapeau de cette crise purement politique. La Seleka hétérocycle a été assimilée aux musulmans, c’est pourquoi les anti-balaka font payer le prix des exactions de la Seléka aux populations musulmanes et l’amalgame bat son plein. Or la Seleka n’est pas synonyme de musulmans et les anti-balaka ne sont pas synonymes de chrétiens comme le disent un bon nombre de médias occidentaux.

14 #Facebook

C’est ici que tout se discute ou se dispute. Des groupes pro ou anti, des pages de soutien, des comptes aux utilisateurs fantômes, des débats, le réseau social Facebook comme pour bien d’autres sujets est devenu l’arbre à palabres de cette crise qui, ici aussi, fait des dégâts. Dès le lendemain du 24 mars des comptes anti-Djotodia ont vu le jour. Jusqu’ici la culture internet qui n’était pas très ancrée dans les mentalités centrafricaines a connu de nouveaux adeptes. Ainsi le journalisme participatif a permis à de nombreux Centrafricains de suivre en un temps record l’avancée des événements aussi bien à Bangui que dans tout le pays.


Seleka, anti-balaka et compagnie : les quatre maléfiques

Si le mal centrafricain est politique, il n’est nul doute que les forces armées impliquées et véritables jouets aux mains des pouvoirs du nord, n’apportent rien de fantastique à la crise qui broie ce petit pays perdu au cœur du continent noir.

Les 4 maléfiques
Le 23 décembre, des tirs tchadiens ont fait plusieurs morts à Bangui.
AFP PHOTO/MIGUEL MEDINA

De la Seleka au Sangaris en passant par les Anti-balaka ou la MISCA, le Centrafrique est otage d’un jeu politique sponsorisé par l’occident.

Séléka ou l’effondrement d’un système politique

Inutile de le rappeler, l’accession au pouvoir de la coalition rebelle Seleka au pouvoir laisse bien de sombres taches indélébiles tant dans le système socio-politique que militaire de la République centrafricaine. Par son leader politique Michel Djotodia, cet ensemble de groupes rebelles et d’opposants au régime déchu de Bozizé s’est mis à dos, l’ensemble de la couche sociale centrafricaine. D’abord par l’accomplissement en bande organisé de pillages des biens privés que publics de la nation, par le manque d’autorité de son leader et par l’exercice d’un système de terreur sur les groupes jugés hostiles au régime. La Seleka a occasionné pour un Centrafrique déjà fragile, la chute des institutions nationales, la fuite des cadres vers d’autres pays comme le Cameroun ou le Congo et la dégradation des valeurs morales d’un pays fondé sur des bases de laïcité. La déclaration de Abakar Sabone, très médiatisé et très contesté par la même occasion qui lui a valu sa place de conseiller à la Présidence de la République semble une des raisons cachées de la prise de pouvoir de la Séléka le 24 mars 2013. Accusé non pas à tort, il est maintenant judicieux de le dire, la suite à Ziguele, Tiangaye et compagnie a renversé le pouvoir du 15 mars pour prôner la division d’un Centrafrique malgré tout riche de son peuple hétérogène.

Encore faut-il le rappeler que les sombres intentions de l’immature couche politique centrafricaine ont permis depuis l’accession à l’indépendance de maintenir dans un cercle infernal ce pays béni des dieux. En cinquante et quatre (54) ans d’indépendance et sept (7) Républiques pseudo démocratiques, le pays aura connu cinq (5) coups d’État et une régression socio-politique constatée à chacun de ces malheureux évènements… La Séléka peut être dernière du malheur centrafricain avant la renaissance d’une véritable couche politique ne pouvait faire mieux.

Anti-balaka, la révolte populaire détournée

Face à la barbarie du nouveau maître des lieux, la population exaspérée voit naitre de ses entrailles une envie de défendre ses valeurs morales et physiques… Des groupes d’auto-défenses naissent. Seuls bémols, les politiques s’y mêlent, la révolte qui se voulait alors populaire tourne au drame et le peuple se fait porter le chapeau du génocidaire. Parti du nord-ouest, région d’origine du déchu Bozizé sucre à la bouche des dirigeants du régime Seleka, les révoltés dit anti-balaka sont très vite prises en otage sous des mains politiques qui dirigent désormais ce groupe hostile au régime de Djotodia et poussent à commettre au même titre que la Seleka,  l’une des pires tueries que le Centrafrique n’ait jamais connu. Le 5 décembre 2013, plus d’un millier de personnes sont atrocement exécutées en moins de 10 jours au nom de la ‘’religion’’.

Misca, l’observateur aveugle de l’Afrique centrale

Ils sont là, voient tout sauf que… Si on pouvait parler du contingent tchadien qui s’est illustré par tous les moyens dans ce désormais conflit sous régional, dira-t-on que l’ampleur qu’il n’y plus en Afrique central personne qui ne soit impliqué dans cette histoire. Petite piqure de rappel, dans la prise du pouvoir de la Seleka, la sécurisation et l’évacuation des ressortissants tchadiens, l’une des colonies à être visée par les acteurs des événements du 5 décembre causant des pertes humaines et matérielle, tout ce qui est tchadien a été et est mal vu en Centrafrique, pour faute, Idriss Deby Itno a promis aux lendemains du rapatriement de ces compatriotes, de s’en prendre à tous ceux qui s’en sont pris aux tchadiens en Centrafrique.

Sangaris, on aurait souhaité un lion à la place de ce papillon

Maurice un ami humoriste le disait en blaguant que le nom choisi pour cette opération lui faisant un peu marrer : Comment faire tomber un dur comme la séléka par un si léger invertébré ?  Moi j’aurai souhaité un lion à la place de ce papillon. Aujourd’hui, je suis d’accord avec lui que la France, prend légèrement le conflit centrafricain. Sinon comment expliquer que ce groupe de Séléka, mal équipé, mal organisé ne soit pas maitriser par les plus qu’officiels, mille (1000) soldats de l’armée française et ceux de la Misca ?  Si ce n’est pour d’autres fins, l’armée française sur place en Centrafrique assiste impuissante au massacre de la population. Elle attend, attend et attend…